Témoignage : Comment tisser sa toile selon le maroquinier Sylvain Lachaud
Fondateur de LS Maroquinerie, le lyonnais Sylvain Lachaud a décidé il y a un an de miser sur le digital. Art’On Matin a rencontré cet artisan d’art passionné pour parler des clés de réussite en communication digitale et e-commerce.
LS Maroquinerie c’est un atelier-boutique près de la place de la Croix-Rousse. Un lieu qui sent bon le cuir tanné et l’huile de coude. Car ici on fait tout soi-même : des sacs et accessoires aux étagères en bois sur lesquels ils paradent. Le magasin fait travailler quatre personnes. Du patron au stagiaire, tous sont maroquiniers de métier, mais chacun a sa spécialité bonus. Morgane aime arranger la vitrine et conseiller les clients, Simon s’occupe du site internet et des réseaux sociaux… Une marque 100% Croix-Rousse donc, mais qui réussit avec brio à s’afficher sur la toile de façon professionnelle et efficace.
Pour Sylvain Lachaud, la e-boutique est une bonne solution quand on veut se développer : « Notre business model ne permet pas d’être présent chez les revendeurs, à cause de leurs marges trop importantes. L’avantage de la vente en ligne c’est qu’elle reste de la vente directe. Nous sommes aussi présents sur la marketplace Amazon Handmade, réservée aux artisans, moins chère et simple d’utilisation. Elle apporte du flux sur notre site ».
Investir dans une communication maison
Comme souvent, le petit coup de pouce qui a tout changé vient d’une belle rencontre : « J’ai eu un vrai coup de chance de connaître Simon, un infographiste en reconversion dans la maroquinerie. Comme nous tous, il fabrique les produits de la marque, mais il passe aussi du temps sur la communication digitale. J’ai compris que si on veut faire les choses bien, le web doit représenter 20% de notre temps de travail ». Quand Sylvain Lachaud a embauché Simon, il n’avait pas le chiffre d’affaires pour se le permettre, mais sa bonne intuition et sa prise de risque ont payé. Grâce à la double compétence et au dynamisme de ce nouvel employé, un site attractif et un community management efficace* lui assurent désormais une belle visibilité.
« Chaque année, je décide d’investir de l’argent dans un point précis, l’année dernière c’était le digital. J’ai donc acheté un bon ordinateur, du matériel photo, un vrai site e-commerce… Quand on se lance dans quelque chose, cela ne sert à rien de le faire à moitié », revendique Sylvain Lachaud. Bien sûr une belle présence sur le web a un coût. Mais pour réduire la facture, la stratégie de Sylvain de faire le maximum en interne est un bon point.
S’appuyer sur des réseaux
Début avril, LS Maroquinerie a invité et accueilli pour la deuxième fois un groupe de blogueurs locaux, venus à l’atelier pour un Workshop DIY. Avec l’aide et les conseils de Sylvain Lachaud et de son équipe, ils ont pu réaliser leur propre porte-carte en cuir. Ils ont ensuite publié sur leur blog un résumé de leur aventure à LS Maroquinerie. Les blogueurs sont de nouveaux influenceurs, très suivis par des communautés en ligne de jeunes actifs. S’intéresser à ce phénomène relève d’une stratégie de communication moderne et particulièrement virale. Pour Sylvain Lachaud il s’agit d’ouvrir son atelier pour un moment de rencontres et d’échanges : « Cela est encore possible avec les blogueurs locaux. Il faut toutefois faire attention aux nationaux, car le phénomène a pris tellement d’ampleur que certains sont devenus de vrais businessmans ».
Le maroquinier croix-roussien est également membre et vice-président de l’association Artisans d’Art à Lyon qui répertorie une quinzaine de créateurs de talents. « Cela permet d’avoir une force de de frappe plus importante en mutualisant un annuaire web, des stands sur des salons, des opérations de communication… C’est plus facile d’obtenir de la reconnaissance quand on est un collectif. Notre association fonctionne par cooptation, nous travaillons en synergie et nous nous recommandons auprès des clients », détaille Sylvain Lachaud.
Se démarquer… mais rester soi même
« Malheureusement, aujourd’hui, il vaut mieux être un bon communicant et un mauvais artisan plutôt que l’inverse. C’est dommage. Pour ma part je m’efforce d’être aussi bon sur les deux plans », explique Sylvain Lachaud. Pour lui rien ne sert de se forcer : « On peut réussir sans le web, mais cela prend naturellement beaucoup plus de temps. De toute façon, si vous ne voulez pas aller sur le net et que vous le faites par obligation cela ne marchera pas. Mais pour quelqu’un qui souhaite se faire connaître rapidement, quand ça ne fonctionne pas il faut savoir se remettre en question et essayer quelque chose de nouveau, plutôt que de pleurer sur son sort ». Le maroquinier a eu un long parcours, avec des expériences diverses dans le commerce avant d’être artisan, ce qui lui permet d’être très ouvert aux techniques de marketing et de communication digitale.
LS Maroquinerie est le dernier atelier lyonnais à faire vivre ce type de savoir-faire du cuir. Son fondateur aime dire : « Nous ne sommes pas des stylistes qui font de la maroquinerie, nous sommes des maroquiniers qui font du style. Nous savons faire des objets qui durent ». Ni les sacs des grandes marques de luxe, ni de la bagagerie classique produite en Chine ou en Afrique du Nord, les accessoires de Sylvain Lachaud sont de l’artisanat Made In France, garantis à vie. Dans son atelier on peut encore faire de la restauration et du sur-mesure. « Récemment, j’ai refusé une commande d’un grand groupe de transport qui souhaitait refaire les portes badges de ses équipes, 1 000 à 3 000 pièces. Impossible pour nous, nous sommes trois, et une série de six pièces c’est déjà beaucoup. Je veux continuer à faire de la slow-maroquinerie. Je ne serais jamais riche… Mais je ne serais jamais pauvre non plus. C’est l’équilibre qui me convient », conclut en souriant Sylvain Lachaud.
Célie Gourdon-Trinquat pour Art’on Matin
* Le compte Facebook de LS Maroquinerie est un modèle des bonnes pratiques de community management.
Retrouvez LS Maroquinerie au 17 rue Dumont à Lyon ou sur la boutique en ligne.